dimanche 18 décembre 2011

Santé mentale et emploi : le rapport de l’OCDE

Lors de la conférence « Concilier la santé mentale et l'emploi » des 12 et 13 décembre 2011, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a présenté son nouveau rapport : Mal être au travail ? Mythes et réalités sur la santé mentale au travail.

L’OCDE présente son étude : « D’après le nouveau rapport de l’OCDE, les troubles mentaux représentent un problème croissant dans la société, affectant de plus en plus la productivité et le bien-être des personnes au travail. Mal-être au travail ? Mythes et réalités sur la santé mentale et l’emploi révèle qu’un travailleur sur cinq souffre de troubles mentaux, comme la dépression ou l’anxiété, et que bon nombre d’entre eux peinent à s’en sortir. Le rapport bat en brèche plusieurs idées fausses concernant la question de la santé mentale, et estime en conclusion que les pouvoirs publics doivent s’efforcer de trouver des solutions nouvelles. La plupart des personnes souffrant d’un trouble mental travaillent : leurs taux d’emploi oscillent entre 55 et 70 %, soit 10 à 15 points de pourcentage de moins que ceux des personnes en bonne santé. »

Ci-après les liens pour accéder directement :
- au chapitre 6 « Résumé et conclusions » : http://www.oecd.org/dataoecd/19/2/49230890.pdf
- au communiqué de presse : http://www.oecd.org/document/0/0,3746,fr_21571361_44315115_49232512_1_1_1_1,00.html
- à la note de synthèse : http://www.oecd.org/dataoecd/18/0/49227202.pdf qui résume les points essentiels du rapport.

jeudi 24 novembre 2011

Arrêt maladie : un choix entre santé et travail ?

Alors que l’entreprise a une obligation de résultat sur la santé des salariés, et pas seulement de moyen, le salarié lui-même renonce parfois à prendre des mesures nécessaires à sa santé, en particulier, à s’arrêter de travailler. Perte de salaire, pression de l’employeur contre les arrêts, stigmatisation lors de la reprise du poste, crainte de perdre son emploi, conscience professionnelle, solidarité vis à vis des collègues… nombreuses sont les motivations du salarié à refuser un arrêt de travail.
Pourtant sortir de l’entreprise, quand les conditions de travail se révèlent pathogènes, est une première démarche nécessaire. L’arrêt, en autorisant la mise au repos du corps et de l’esprit, permet de ne plus tenir à tout prix, d’interroger sa situation professionnelle, de la comprendre, seul ou accompagné, et enfin, peut-être, de se reconnecter à ce qui est bon pour soi-même, loin de tout idéal social prescrit et plaqué sans concertation.

L’article ci-dessous de Jean-Baptiste Chastand et Laetitia Clavreul, Le Monde, édition du 24 novembre 2011, s’intitule « Pression au travail, manque d'argent : ces patients qui refusent les arrêts-maladie » et décrit les freins exprimés par les salariés quand ils refusent un arrêt de travail.

« La question des arrêts-maladie donne décidément du fil à retordre au gouvernement. Après avoir renoncé à modifier le mode de calcul des indemnités journalières pour faire des économies, le voilà prêt à reculer sur le quatrième jour de carence pour les salariés du privé. Par deux fois, les mesures qu'il défendait ont été jugées injustes : elles touchaient les travailleurs dont l'entreprise ne compense pas la baisse de revenu liée à l'arrêt-maladie.

De quoi aggraver un phénomène observé par de plus en plus de médecins en ces temps de crise : le refus des malades de se mettre en arrêt-maladie. Un sujet peu documenté. "On en parle peu, sans doute parce que les arrêts-maladie sont un sujet tabou et qu'il est de bon ton d'estimer que les Français sont des fainéants", analyse Claude Bronner, du syndicat Union Généraliste. Ce médecin, qui se dit inquiet de l'augmentation de la souffrance au travail, voit souvent des patients qui lui font part des pressions de leur entreprise contre les arrêts.

Surtout, il y a le problème financier. Tous ne sont pas égaux devant la possibilité, ou non, de s'arrêter. Les médecins distinguent trois catégories : les fonctionnaires, assez bien protégés ; les salariés des grandes sociétés, pour lesquels il n'y a pas d'incidence financière quand ils se mettent en congé maladie ; et un troisième groupe, ceux dont les entreprises ne compensent pas les jours de carence, ni la baisse de revenu engendrée par le versement d'indemnités moins élevées que le salaire. Selon le gouvernement, seuls 30 % des salariés ne reçoivent pas de complément de salaire, un chiffre contesté par les syndicats. "Même minoritaires, ces personnes sont nombreuses quand même", insiste le Dr Bronner, évoquant les smicards pour qui gagner moins est impossible.

Ne pas pouvoir s'arrêter peut constituer un frein à l'accès aux soins. Comme les dépassements d'honoraires, le coût des complémentaires santé, ou les délais d'attente auprès des spécialistes, motifs bien connus de renoncements. A ces réfractaires, les médecins donnent des arrêts, considérant qu'ils font partie de la prescription comme les médicaments. Mais ils savent pertinemment qu'ils n'en tiendront pas compte. Parfois, les malades s'arrêtent mais repartent travailler alors qu'ils ne sont pas guéris. D'autres reportent une opération, ne pouvant se permettre plusieurs semaines d'arrêt. »

Pour lire la suite de l’article suivre le lien :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/11/23/pression-au-travail-manque-d-argent-ces-patients-qui-refusent-les-arrets-maladie_1608040_3224.html

vendredi 4 novembre 2011

Risques à caractère psychosocial

Ce jour sur le Nouvel Economiste, l’article « Coaching – Les risques psychosociaux » signé Charly Masliah aborde longuement la question du mal être au travail et l’étaye de références théoriques et de témoignages.

« Le mal-être au bureau ? Voilà bien un sujet sur lequel les entreprises ne peuvent plus faire la sourde oreille. Pertes financières, déficit d’image, destruction du lien social au sein de l’entreprise… Les conséquences des risques psychosociaux pèsent lourd. Si la sonnette d’alarme a bien été tirée, peu d’actions ont encore été mises en place dans la pratique. Et les entreprises se contentent bien souvent de traiter les symptômes du mal, en soignant les blessures de leurs salariés, au lieu de s’attaquer à ses racines : l’organisation du travail et les modes de management eux-mêmes. Un défi qui demandera, certes, bien plus de courage. »

Pour lire la suite et les précisions que l’auteur apporte sur le statut de la maladie professionnelle en France : http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/coaching-les-risques-psychosociaux-12616/

jeudi 27 octobre 2011

Facebook et identité professionnelle

Une mobilisation rapide et massive via Facebook stoppe le licenciement d’une caissière accusée du vol d’un ticket de caisse. De nombreux articles relatent cette histoire qui a créé l’indignation :
http://www.francesoir.fr/actualite/societe/cora-caissiere-sauve-son-emploi-grace-au-soutien-sur-internet-151122.html

Facebook, à l’aide des salariés ? On peut s’interroger. Dans un même temps, une autre actualité démontre que s’exprimer sur ce réseau social peut tout autant conduire au licenciement :
http://elle.sfr.fr/Societe/News/Critiquer-son-chef-sur-Facebook-peut-mener-au-licenciement-1424415

Opinions, photos, commentaires publiés sur Internet sont considérés comme publics et ne relèvent pas de la sphère privée. Conjugué à l’absence de droit à l’oubli imposé par la mémoire du web, écrire sans retenu ses états d’âme, qu’ils soient critiques ou romantiques, ne laisse aucune place à la fluctuation de l’identité. Comme gravés dans le marbre, les mots choisis et utilisés à un moment T dans un contexte précis figent sans nuance possible sentiments et pensées au regard de tous.

Alors que l’identité d’un sujet n’est jamais définitivement stabilisée, mais en confirmation quotidienne dans les relations aux autres tant affectives que de travail, ne pas respecter le caractère privé de la parole écrite porte atteinte à la dynamique et à la promesse de changement que contient une personne.

La multiplication par le groupe Facebook des fonctionnalités et des rubriques de recueil d’informations (santé, emploi, relations de familles…) transforme instantanément en données publiques les confidences d’un internaute. L’article ci-dessous revient sur ces questions et rappelle qu’il relève de la liberté de chacun de donner à voir sa vie privée et professionnelle ou de les protéger :
http://www.rue89.com/2011/09/28/le-nouveau-facebook-fait-entrer-votre-vie-privee-dans-lhistoire-223871

Les réseaux sociaux sont considérés comme « incontournables » pour postuler, recruter, s’informer du marché de l’emploi. Mais, quand un salarié s’en saisit pour communiquer sur ses conditions de travail ou de management, et s’y confie à l’écrit, au détriment de la parole, emploie-t-il alors le média le plus bénéfique pour lui ?

Adresser ses difficultés à une personne physiquement présente rompt la solitude. Préférer le face à face plutôt que le Facebook pour dire ses souffrances au travail dans le cadre d’une véritable écoute participe à la restauration de la capacité de penser et d’agir.

Valérie Tarrou

mardi 18 octobre 2011

Blog de veille sur la santé au travail

Accueilli par la revue Santé & Travail, le blog de Jacques Darmon, médecin du travail et engagé à la CFDT, est une source actualisée d'informations tant juridiques, que médicales ou sociales en lien avec la santé au travail. Il partage cette veille au bénéfice de ses lecteurs et exprime sa subjectivité en toute transparence.
A découvrir : http://alternatives-economiques.fr/blogs/darmon/

mardi 4 octobre 2011

« De bon matin » il a rencontré la souffrance

Sortie mercredi 5 octobre du film « De bon matin » de Jean-Marc Moutout, avec Jean-Pierre Darroussin , Xavier Beauvois , Yannick Renier ... un film sur un conflit purement professionnel inspiré par un fait divers arrivé en Suisse.

Lundi matin, Paul Wertret, cinquante ans, se rend à la Banque Internationale de Commerce et de Financement, où il est chargé d’affaires. Il arrive, comme à son habitude, à huit heures. Il s’introduit dans une salle de réunion, sort un revolver et abat deux de ses supérieurs. Dans l’attente des forces de l’ordre, cet homme, jusque là sans histoire, s’enferme dans son bureau et revoit des pans de sa vie et les événements qui l’on conduit à commettre son acte.




Lire l’article de Rue89 : « Souffrance au travail : «De bon matin», il tue deux collègues » : http://www.rue89.com/2011/10/03/souffrance-au-travail-de-bon-matin-il-tue-deux-collegues-224354

mardi 27 septembre 2011

« Souffrance au travail : vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant ! »

Un écrit proposé par Alain Astouric, auteur de « La Tyrannie du marketing » (2010, Ed Ere), « Le Management durable » (2004, Ed Chronique Sociale).

Depuis deux décennies les techniques managériales de mutation organisationnelle permanente, de travail en mode projet, de réingénierie, d’empowerment* et de rémunération variable individuelle ont poussées les hommes, pardon ! les ressources humaines, vers la religion de la mobilité, la transformation permanente, la flexibilité, la polycompétence et l’individualisation des résultats au sein d’une entreprise prétendument individualisée pour le bien de tous.

Or, s’il est exact que ces évolutions peuvent offrir certaines opportunités de responsabilisation des salariés et de mise en place d’organisations moins hiérarchiques, elles font surtout peser de graves risques sur la santé mentale des travailleurs. Alors que faire en ces temps du triomphe de l’individualisme ?

Etant donné qu’on ne peut pas revenir en arrière, il est urgent de reconstruire l’entreprise. Non pas par nostalgie du passé mais parce que l’on tient là l’unique façon de réussir l’avenir.

Il est plus que temps de donner enfin à la maîtrise et aux cadres non seulement une réelle et suffisante marge de manœuvre mais aussi une formation sérieuse, complète et concrète, d’abord aux problématiques de la santé et du bien-être au travail, ensuite, et surtout, aux dix techniques qui fondent (depuis presque toujours) le management efficace d’une équipe au travail : la communication interindividuelle ; la gestion du changement dans les organisations ; la recherche de l’amélioration de la qualité ; la délégation de pouvoir ; la prise de décision ; la négociation interindividuelle ; la motivation de l’homme au travail ; la conduite de réunion ; la prise de parole en public ; l’entretien de face-à-face.

Nous sommes bien conscient que vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant et que la pédagogie à elle seule n’est pas la panacée. Mais si l’on n’utilise pas en premier lieu les moyens existants, ceux là même qui ont depuis longtemps fait leurs preuves, rien ne sera jamais résolu.

En outre, parce qu’en matière de relations sociales dans le travail, de conditions de travail et d’organisation du travail la démarche collective est toujours à privilégier, nous insistons sur la nécessité à former les décideurs et dirigeants ‒ surtout les plus jeunes ‒ au minimum aux problématiques de la santé et du bien-être au travail ainsi qu’à la gestion du changement dans les Organisations. De préférence à la totalité de ce même programme.

On a là un train de mesures qui en ne confondant pas prévention du stress et poudre aux yeux devrait nous permettre de regagner suffisamment de confiance et d’adhésion pour, enfin, travailler mieux.

Alain Astouric
http://astouric.icioula.org/

* La réingénierie consiste en un écrasement de la pyramide hiérarchique par disparition de la plupart des agents de maitrise et cadres de proximité. L’empowerment, au prétexte de lui offrir l’autonomie, aboutit en réalité à placer le salarié dans une position intenable entre, d’une part la stricte obligation de résultats immédiats et d’autre part le strict respect de normes, règlements procédures et processus.

dimanche 11 septembre 2011

Et si vous deveniez co-auteur du blog ?

Tout en poursuivant la publication d’articles sur l’actualité de la psychologie du travail et l’approfondissement de concepts, le blog s’enrichit de nouvelles rubriques et propose un zoom sur la souffrance au travail via une consultation et les risques psychosociaux.

Je fais appel à vos témoignages, que vous soyez un praticien ou un salarié, aux situations vécues, aux interrogations et aux avancées dans ces deux domaines afin d’enrichir les rubriques de vos contributions, anonymes ou personnalisées, à m’envoyer par mail (voir la rubrique Contact).

Ecrire, et adresser son écrit, peut constituer un premier pas pour ne pas rester seul(e) face à une situation professionnelle perturbante, pour s’autoriser à dire sa détresse, et ressentir que les conditions de travail subies commencent à porter atteinte à votre santé et à votre capacité de travailler.

Cette participation à la vie du blog ne remplacera pas le travail réalisable dans une consultation spécialisée Souffrance et Travail mais ne pouvons nous penser avec Tosquelles (1) que « c’est en faisant des choses que l’homme se fait lui-même d’autant plus que l’on ne peut pas faire quoi que ce soit sans compter sur les autres » (2).

Aussi je vous propose de faire et de faire ensemble.

Valérie Tarrou

1) François Tosquelles, psychiatre catalan (1912-1994), est l’un des inventeurs de la psycothérapie institutionnelle. « Le travail thérapeutique en psychiatrie », Erès, 2009.

2) Lire sur : http://www.psychologuesenresistance.org/spip.php?article30 la post-face écrite par Yves Clot, titulaire de la Chaire de psychologie du travail du Cnam, pour la réédition du livre de F. Tosquelles en 2009 aux éditions Erès, ouvrage publié en 1967 par les éditions du Scarabée.

samedi 16 juillet 2011

L'Observatoire indépendant Santé et Travail : élu 'Site Web du mois' par « Le Carnet/PSY »

La revue Le Carnet/PSY, n°155 de juillet-août 2011, dans sa rubrique « Le site Web du mois » consacre à l’« Observatoire indépendant Santé et Travail » l’article ci-dessous signé Christian Robineau.

http://observatoire-sante-travail.blogspot.com/
OBSERVATOIRE INDEPENDANT SANTE ET TRAVAIL

« Sur un T-shirt aperçu au détour d’une manifestation, ceci, imprimé en cercle : "Travailler plus pour travailler plus pour travailler plus pour…" Avouons que cette circularité narquoise nous en dit bien davantage que les journaux télévisés sur l’imposture de certain slogan électoral que chacun garde en mémoire. Bien davantage, également, sur ce qu’une politique conduisant à travailler toujours plus et toujours plus mal (quand on a un travail), pour gagner souvent moins, peut générer comme souffrances, parfois létales.

Ce thème de la souffrance au travail (ou plus exactement causée par une certaine organisation du travail), exploré depuis de nombreuses années par des auteurs trop solitaires comme Christophe Dejours ou Yves Clot, et dont France Telecom et Renault ont fait ces dernières années la fortune médiatique, nous vaut l’intéressant blog d’une psychologue du travail et psychanalyste, Valérie Tarrou. Son but : "aider à mieux comprendre l’actualité de la psychologie du travail (sociale, événementielle...) grâce aux apports de la théorie".

Appelant à la rescousse des auteurs somme toute peu invités au journal de TF1 (Hegel, Canguilhem, Ricœur, Spinoza), V. Tarrou se saisit ainsi d’événements sociaux, d’articles parus dans la presse, de la publication d’ouvrages ou de rapports, pour nous entretenir de questions aussi rafraichissantes que le suicide au travail, le harcèlement moral ou le travail des femmes, clarifier l’air de rien des concepts tels que stress, néo-taylorisme ou risque psychosocial, ou encore nous faire bénéficier des ses dernières fiches pratiques sur la médecine du travail, les CHSCT ou les IPRP (V. Tarrou travaille trop). Le tout de manière toujours claire et pédagogique (V. Tarrou mérite une augmentation).

Nulle part, pourtant, n’est suggéré qu’utiliser "souffrance" et "travail" dans une même expression pourrait bien être pléonastique. "Travail" trouve en effet son origine étymologique dans le bas latin tripalium, "instrument de torture", de tri ("trois") et palus ("pieu"), littéralement : "trois pieux". La langue est étonnante. Allongez-vous sur un pieu, c’est du repos. Sur trois, hop ! C’est du travail. »

Christian Robineau
http://www.carnetpsy.com/

lundi 4 juillet 2011

« FEURS »

« Feurs », un écrit sur le travail et ses souffrances qui m’a touchée et dont je prolonge le partage avec l’aimable autorisation de son auteur, le Docteur Brigitte Font Le Bret. Psychiatre, spécialiste des maux professionnels, expert judiciaire près la cour d'appel de Grenoble. VT

Je suis née dans une usine à une dizaine de quelques kilomètres de la fonderie de FEURS et ce matin après avoir vu ce qu'il reste de celle-ci je pleure de tristesse, de colère tout comme lorsque j'étais enfant j'ai pleuré lorsque la très petite usine de mon père a brûlé et que j'ai vu les flammes et les larmes de mon père, ceci a été le fondement de mon choix professionnel : médecin du travail et psychiatre, spécialiste en souffrance au travail et en suivi post accident du travail ou maladie professionnelle.
Alors ce billet je l'écris ce matin pour la famille des victimes, pour les salariés, pour les habitants de Feurs. Il y a quinze jours j'étais au concert de Lavilliers à Saint-Etienne, j'ai fait le déplacement de Grenoble car sa chanson Le Stéphanois et tant d'autres me vont droit au cœur : « On n'est pas d'un pays mais d'une ville... » chante-t-il, cette phrase est mienne.
Je pense aussi à tous les salariés en maintenance qui mettent quotidiennement leurs vies en danger dans un paysage industriel en déliquescence. La sécurité sans moyen financier à la hauteur ne peut exister et quotidiennement dans mon cabinet j'entends de telles confidences, pas assez d'EPI, réparations de fortune par manque de matériel, perte de savoirs non transmis par les « anciens » qui ont été mis à la porte par des PSE, produits cancérigènes sur des combinaisons de travail que l'on ne peut nettoyer, produits chimiques explosifs trouvés au décours d'un dépannage dans un atelier non prévu pour çà, chaussures de sécurité non réglementaires quand il faut travailler à moins 10 degrés au sommet d'une installation, parkas non ignifugées, gants trop courts et dans mon cabinet les cicatrices, les plaies celles que l'on voit mais aussi celles qui ne se voient pas et celles-ci font très mal, je vous en supplie n'utilisez jamais le mot « blessés légers » car parfois leur douleur morale qui se nomme syndrome psychique post traumatique est indicible.
J'essaie de panser les plaies, celles qui ne se voient pas et je cache mes larmes.
Docteur Font Le Bret Brigitte

A réécouter, le Docteur Brigitte Font Le Bret sur Arte :
http://www.arte.tv/fr/2952388,CmC=2952386.html

mardi 21 juin 2011

La Centralité du travail

Dans l’article daté du 10 mai : « Comment le travail peut-il faire si mal, jusqu’à mener un salarié au suicide ? », j’ai abordé cette question par l’angle de la construction identitaire. Reprenant le raisonnement, je souhaite maintenant l’éclairer par le thème de la centralité du travail qui constitue pour moi l’une des clés incontournables pour comprendre la souffrance au travail.

La participation essentielle du travail à notre construction identitaire est peu pensée dans l’exercice quotidien du métier. Quand un sujet appréhende et s’empare plus clairement du rôle fondamental du travail dans ce processus qui se prolonge tout au long de l’existence, il prend la mesure de ce que Christophe Dejours (1) désigne par le concept de « centralité du travail ».

La prise de conscience de la centralité du travail dans notre fonctionnement psychique, met en lumière l’importance de sa place dans notre vie. Elle souligne tout ce que l’on met en jeu quand on travaille, tout ce que l’on affirme de soi et de ses valeurs à travers ses gestes de travail. Elle révèle proportionnellement tout ce qui peut être abîmé en nous quand nos critères éthiques constitutifs d’un bon travail, d’un travail qui a du sens, qui donne du sens, sont remis en question, bafoués, ou brisés.

Réaliser que travailler n’est pas externe, que ça touche à notre noyau dur, que le travail nous transforme, nous façonne, et ne constitue pas seulement une source de revenus tend à faire d’une personne ce que Marie Pezé (2) appelle un « salarié adulte ». Un salarié plus conscient de l’investissement subjectif et affectif qu’il prend le risque de mettre dans son travail. Et ainsi, peut-être plus à même de repousser toute démarche qui viserait à porter atteinte à son travail et à sa santé.

Je voudrais citer ici une définition de la santé pour préciser ce que j’entends par ce mot. Parce que pour moi, la santé ne désigne pas seulement l’absence de la maladie. Il s’agit de la définition donnée par Georges Canguilhem (3), médecin et philosophe du XXe siècle. Il a particulièrement pensé la place de la santé comme un continuum entre le normal et le pathologique. Il écrit : « Je me porte bien dans la mesure où je me sens capable de porter la responsabilité de mes actes, de porter des choses à l’existence, et de créer entre les choses des rapports qui ne leur viendraient pas sans moi, mais qui ne seraient pas ce qu’ils sont sans elles. »

Reconnaître la place et le rôle du travail dans notre vie, mesurer ce qui se joue pour nous en terme de construction identitaire, de respect de nos valeurs et de nos choix, renforce la conscience de notre autonomie, de notre responsabilité tant vis-à-vis de nous-mêmes que vis-à-vis des autres, et contribue à bien se porter.

Valérie Tarrou

1) Christophe Dejours, psychanalyste, psychiatre, professeur titulaire de la chaire Psychanalyse, Santé et Travail du Cnam.
2) Marie Pezé, psychologue, psychanalyste, fondatrice des consultations Souffrance et Travail. Pezé, M., Saada, R., Sandret, N. (2011). « Travailler à armes égales – Souffrance au travail : comment réagir ».Paris : Pearson. P. 44.
3) Canguilhem, G. (réed 2002). « Ecrits sur la médecine ». Paris : le Seuil. P. 68.

jeudi 9 juin 2011

Souffrance au travail et cinéma

« Pour son second long-métrage au cinéma Prud'hommes, Stéphane Goël s’est intéressé à la souffrance au travail. Le réalisateur de documentaire suisse a posé sa caméra dans la salle du Conseil de Prud’hommes de Lausanne et nous laisse découvrir, sans les commenter, les petits litiges et les grands drames qui s’y jouent quotidiennement. »
Pour en savoir plus : http://www.elle.fr/Loisirs/Cinema/News/5-bonnes-raisons-d-aller-voir-Prud-hommes-1609730

samedi 4 juin 2011

Mettre le salarié au centre ?

Ci-dessous un article de Philippe Escande publié dans Les Echos le 3 juin 2011 : «Le retour de l'humain dans le management ?»

« A la faveur de la crise, les entreprises redécouvrent l'importance des salariés, de leur motivation et donc de leur implication au travail.
Après avoir courtisé leurs dirigeants, leurs actionnaires, leurs clients et même l'opinion, voilà que les entreprises s'intéressent à leurs employés. Il faut dire que de récentes affaires, comme celles de Renault ou France Telecom ont montré les ravages de la démoralisation des troupes. Vingt ans de pression actionnariale, de changements technologiques et d'évolutions sociologiques, conclus par une crise majeure, ont eu raison de la fiction d'une entreprise heureuse dans un environnement sain. »

Lire la suite de l’article : http://www.lesechos.fr/management/motiver/0201416547139-le-retour-de-l-humain-dans-le-management-171968.php

samedi 28 mai 2011

Yves Clot : reconnaître le travail de qualité

Ci-dessous, une interview d'Yves Clot réalisée par Sandrine Chauvin et publiée sur capital.fr en mars 2011 : "Les entreprises ne valorisent pas assez le travail bien fait".
Un an après l'affaire des suicides à France Télécom, 1.300 entreprises de plus de 1.000 salariés ont conclu des accords sur les risques psychosociaux et mis en place des plans de prévention du stress. Pas suffisant toutefois, pour Yves Clot, titulaire de la chaire de psychologie du travail du Cnam * : "les employeurs se contentent du diagnostic sans prendre de vraies mesures".

Capital.fr : Il y a un an, le ministère du Travail publiait sur son site la liste des bons et des mauvaises élèves en matière de stress au travail. Cette pression médiatique a-t-elle été efficace ?
Yves Clot : Les accords sur les risques psycho-sociaux permettent surtout aux employeurs de s'abriter derrière l'évaluation des risques pour faire semblant d'agir. Dans les bureaux, rien n'a changé. Les salariés ont simplement rempli un questionnaire sans que cela ait des répercussions sur leur quotidien. Le problème de fond reste donc entier. Il existe un écart grandissant entre la conception du "travail bien fait" du salarié et les mesures de performance imposées par l'entreprise. Moins de temps, moins d'effectifs, moins d'investissements… ils n'ont plus les moyens de faire un travail qu'ils estiment correct, ce qui entretient un mal-être ambiant, avec comme conséquences une épidémie de troubles musculo-squelettiques, une explosion des maladies professionnelles, voire des suicides en série…

Capital.fr : Les entreprises en ont-elles conscience ?
Yves Clot : Nous sommes plutôt dans le règne du déni. D'un côté, les dirigeants imposent une conception de la performance court-termiste et productiviste. De l'autre, les DRH mettent en place des cellules d'écoute pour recueillir les plaintes des salariés mais sans jamais les prendre en compte. Les entreprises ne valorisent pas assez le travail bien fait. Les entretiens annuels, par exemple, sont totalement détournés. L'objectif est d'évaluer les performances, le facteur humain est le plus souvent négligé.

Capital.fr : La question du stress au travail est donc loin d'être résolue…
Yves Clot : Ecouter ne suffit pas pour soigner. C'est une règle de base en psychologie. A force d'écouter sans prendre des mesures, le dialogue risque d'être totalement rompu. Dans les discussions actuelles, les employeurs se contentent encore d'évaluer les risques sans consulter leurs salariés sur la qualité du travail accompli.

Capital.fr : C'est-à-dire…
Yves Clot : Les salariés ont des capacités de créativité qui ne sont pas suffisamment exploitées. Plutôt que de parler de "risques psychosociaux", je préfère d'ailleurs utiliser le concept de "ressources pyschosociales". Pour donner du sens au travail, il est possible de recréer une dynamique collective. Il faut réconcilier le conseil d'administration, les syndicats et le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans une nouvelle institution, dont la mission serait de discuter des critères d'évaluation professionnelle. Respecter le travail bien fait est la meilleure des préventions contre le stress, car il n'y a pas de "bien-être" sans respect du "bien faire".

Propos recueillis par Sandrine Chauvin
http://www.capital.fr/carriere-management/interviews/les-entreprises-ne-valorisent-pas-assez-le-travail-bien-fait-583625

* "Le Travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux" (éd. La Découverte)

jeudi 19 mai 2011

La « faute inexcusable » de Renault confirmée en Appel

Un article du Monde de ce 19 mai 2011 titre « Suicide d'un salarié : la "faute inexcusable" de Renault confirmée» et développe les faits :
« La "faute inexcusable" de l'entreprise Renault dans le suicide en 2006 d'un ingénieur du site de Guyancourt (Yvelines) a été confirmée jeudi 19 mai par la cour d'appel de Versailles. Une décision qui prouve que "Renault avait nécessairement conscience du danger auquel était exposé Antonio B. au regard de sa charge de travail", estime l'avocate de la famille du salarié, Me Rachel Saada.

Déjà condamné en première instance par le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Nanterre en décembre 2009, au motif qu'il "aurait dû avoir conscience du danger auquel" son salarié "était exposé dans le cadre de son activité professionnelle", le constructeur automobile avait fait appel de la décision. Une porte-parole de Renault a déclaré à l'AFP "prendre acte de la décision" de la cour d'appel et attendre de connaître les "éléments de motivation de la décision avant de décider" d'un éventuel pourvoi en cassation. »

Pour lire la suite : http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/05/19/suicide-d-un-salarie-la-faute-inexcusable-de-renault-confirmee_1524174_3234.html

mardi 10 mai 2011

« Comment le travail peut-il faire si mal, jusqu’à mener un salarié au suicide ? »

Invitée par l’association Brie Nangissienne citoyenne et Solidaire à présenter une intervention sur le thème de la souffrance au travail, et à répondre aux questions du public, j’ai choisi d’aborder le sujet par l’angle suivant : «Comment le travail peut-il faire si mal, jusqu’à mener un salarié au suicide ?» Le texte ci-dessous présente le déroulé des points abordés.

« Pour avancer dans cette réponse, je vais m’attacher à ce qui dans notre rapport subjectif au travail, dans le lien particulier qui existe entre nous et notre travail, peut éclairer la compréhension de cette souffrance spécifique. Une souffrance difficile à comprendre par la personne qui la vit, et encore plus difficile à appréhender pour son entourage tant professionnel que personnel, qui de ce fait ne peut et ne sait pas comment l’aider.

Cette question que portent les patients «Comment le travail peut-il faire si mal ?» est centrale dans la souffrance exprimée. «Je ne comprends pas», ces mots peuvent même être difficiles à prononcer par les patients qui se demandent quelle sorte de tare se cache en eux pour qu’ils souffrent autant. Ce qui rend l’aveu même de la souffrance au travail délicat à confier.

La plupart des salariés sont rapidement en capacité d’identifier avec beaucoup de conscience les manœuvres dont ils sont l’objet dans leur entreprise. Manœuvres que souvent ils désignent par du harcèlement, même si la situation recouvre bien des nuances qui seront à mettre à jour.

Mais qu’un patient puisse dire les faits qui ont conduit à la dégradation de ses conditions de travail ne suffit pas pour mettre fin à la souffrance qu’il ressent. Cela constitue une étape indispensable mais les raisons pour lesquelles ce ressenti est aussi douloureux n’ont pas encore de réponses. Pourquoi la souffrance vécu est aussi ample, aussi destructrice, est une question difficile à élaborer, surtout quand on y réfléchit seul. Cette interrogation lancinante pousse le salarié à s’interroger sur sa fragilité personnelle jusqu’à perdre confiance en lui.

C’est pour cela que la notion de «salarié fragile » que l’on retrouve dans la presse et dans les mots de managers me parait pernicieuse. Insidieusement elle peut amener un salarié à penser en son for intérieur, «si j’ai si mal c’est que je suis fragile». Et le pas suivant de son raisonnement intime pourra être «je suis fragile donc je suis responsable de ce qui m’arrive» et le pas suivant le conduira à un sentiment individuel de culpabilité qui cristallisera le problème sur des relations de personnes et détournera des véritables questions collectives sur le travail. La personne va croire que ce qui lui arrive est dû à ce qu’elle est. Sans replacer sa souffrance dans le contexte de son travail et des effets de l’organisation du travail sur sa santé.

Or de mon point de vue, si les individus sont partie prenant de la situation, ils n’en sont pas la cause, l’organisation du travail, le politique, l’économique et le social ne doivent absolument pas être exclus du raisonnement.

Dans une consultation Souffrance et Travail, le travail réalisé par le patient et le psychologue du travail engage deux démarches en parallèle :
- D’une part, la compréhension de la situation grâce au récit de la chronologie de la dégradation des conditions de travail,
- D’autre part, la recherche de ce que la situation signifie pour la personne au regard de sa construction identitaire, de son éthique et des atteintes qui y ont été portées.

Le concept d’identité permet de saisir ce qui peut être mis à mal dans le vécu subjectif d’un salarié par certaines formes d’organisation du travail. Que ce salarié soit homme, femme, faible, solide, cadre ou ouvrier.

D’un point de vue psychologique, l’identité est personnelle, chacun n’en a normalement qu’une, elle constitue l’armature de notre santé mentale. Malgré ce rôle fondamental, elle n’est pourtant jamais définitivement stabilisée. Et elle cherche une confirmation quotidienne dans le rapport aux autres, d’une part dans les relations d’amour, mais également, et tout autant, dans les relations de travail.

Dans ce processus en mouvement, le travail est donc une occasion de se construire et de former son identité. C’est un processus continu qui engage dans la durée. Comme le dit Christophe Dejours, professeur titulaire de la chaire Psychanalyse, Santé et Travail du Cnam, par le travail on transforme le monde mais le travail nous transforme également.

Le fait que l’identité soit en évolution tout au long de la vie a comme conséquence bénéfique de permettre de s’adapter. Cette plasticité est nécessaire pour accueillir les mutations, les évolutions, externes comme internes, en particulier celles exigées par le travail. Mais quand sa construction quotidienne est menacée, et elle peut donner lieu à une crise d’identité.

Ainsi, quand l’organisation du travail adresse des demandes incessantes d’adaptation, de déplacement, de transformation, elle porte atteinte à cette construction identitaire qui aurait pu trouver dans le travail sa voie royale. Même si il est ordinaire de passer par des moments difficiles et critiques dans sa vie professionnelle.

Quelles sont conséquences et les risques d’une entrave de la construction identitaire ? J’identifie 3 niveaux de risques.

1) Le premier risque encouru est de se perdre dans sa construction identitaire. La construction identitaire se réalise dans les relations aux autres. En particulier par la reconnaissance que les autres, tant la hiérarchie que les collègues, apportent au travail effectivement réalisé. Face à des changements (de cadence, de logiciel, de bureau, de façon de faire, de supérieur hiérarchique) le salarié déploie des efforts, consent des sacrifices qui déteignent sur sa famille, sa disponibilité et sa santé. Le travail n’apporte plus au salarié l’élément principal qui assure le renforcement identitaire : la reconnaissance.

2) L’entrave de cette construction identitaire tant personnelle que professionnelle via le travail, engendre un deuxième risque, celui d’une perception pervertie et culpabilisante de la situation. La souffrance ressentie isole de son collectif de travail, et apparaissent les premiers signes d’atteinte à la santé : un état de qui vive, la peur de se rendre au travail, des cauchemars, la difficulté de trouver le sommeil, la rumination de la situation, la perte de l’estime de soi, du sentiment de ses compétences, etc.

3) Le troisième risque, dans l’augmentation de la souffrance vécue, est l’atteinte massive de la santé, mentale et physique, et la possibilité d’une décompensation avec pour conséquences des pathologies telles l’angoisse, la dépression, des troubles-musculo-squelettiques, le burn out… et le suicide, qui se présente alors comme ultime moyen de dire que l’on est, qui l’on est.

Les thèmes de la centralité du travail et du pouvoir d’agir donneraient eux aussi des clés de compréhension à ma question initiale «Comment le travail peut-il faire si mal, jusqu’à mener un salarié au suicide ?» Je les développerai dans un prochain article. »

Valérie Tarrou
Conférence Nangis – 7 mai 2010 - http://bncs.asso-web.com/

samedi 30 avril 2011

www.souffrance-et-travail.com

Ouverture du site www.souffrance-et-travail.com créé à l'initiative de Marie Pezé, responsable du réseau Souffrance et Travail, avec une équipe de psychothérapeutes, avocats, médecins du travail, médecins généralistes et autres spécialistes du travail.

Le site donne accès à des informations utiles et concrètes sur la souffrance au travail via des vidéos, un magazine et un forum. Il précise les adresses des services de pathologies professionnelles, des consultations Souffrance et Travail et propose des guides pratiques à destination des salariés, des acteurs de l’entreprise, des professionnels de santé et des médecins du travail.

Un partage d’outils indispensables pour penser le cadre de son travail en «salarié adulte». Et surtout, ne pas rester seul.

Valérie Tarrou

mardi 26 avril 2011

Travailler à corps perdu...

A lire sur Le Monde : « France Télécom : un salarié s'est suicidé en s'immolant par le feu », en suivant le lien  http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/04/26/france-telecom-un-salarie-s-est-suicide-en-s-immolant-par-le-feu_1512911_3224.html

lundi 18 avril 2011

Souffrance au travail : des solutions d’un genre nouveau ?

Les propositions de Davor Komplita, psychiatre genevois spécialiste des troubles liés au travail, dans un article de Sophie Peters publié par La Tribune : « Le burn out est un chagrin d'honneur ».

Extrait : « Les plus vulnérables, ce sont les quadras et les quinquas qui ont intégré les valeurs du travail car leur dignité se joue là. Sans compter l'imposture qu'ils vivent d'être évalué individuellement lorsque leur travail est collectif. Ceux-ci n'ont aucun anticorps pour lutter contre le mal. . Mon rôle est de les aider à prendre de la distance par rapport à cette notion de « travail bien fait » qu'ils ne peuvent plus exercer à cause des multiples contraintes dans lesquels ils sont pris. En revanche les générations X, Y et Z (de 35 à 18 ans) ont non seulement des anticorps mais aussi des antidotes. »

Pour lire la suite : http://www.latribune.fr/carrieres/20110417trib000615871/le-burn-out-est-un-chagrin-d-honneur.html

jeudi 24 mars 2011

« Travailler à armes égales » par Marie Pezé

En avril, sortie du nouvel ouvrage de Marie Pezé : « Travailler à armes égales – Souffrance au travail : comment réagir », Pearson. Ci-dessous : le texte du 4e de couverture.

« Après Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés, qui dressait un état des lieux de la souffrance au travail et pointait la gravité croissante des cas, Marie Pezé poursuit ici sa réflexion sous un angle qui se veut positif : comment réagir ?

« Si le travail peut faire souffrir, c’est avant tout parce qu’il est porteur de nombreuses promesses », dit-elle. Promesse de l’utilisation et du développement des capacités physiques et mentales, promesse d’accomplissement de soi et d’émancipation sociale, promesse du « vivre ensemble » et du dépassement des fragilités infantiles…

Celui qui travaille donne souvent sans compter à un monde du travail qui, lui, ne fait que compter. Investi corps et âme, on comprend qu’il ait du mal à prendre de la distance, à défendre ses droits, à trouver des appuis. Le rapport de forces est inégal entre la partie faible, le salarié, et la partie forte, l’entreprise.

Marie Pezé nous livre ici les outils élaborés par le réseau de prise en charge de la souffrance au travail, avec Rachel Saada, avocate spécialiste en droit social et Nicolas Sandret, médecin inspecteur du travail : mieux connaître le droit du travail et les implications d’un contrat, savoir reconnaître et dénoncer les techniques de management pathogènes, apprendre à décrire son travail et les raisons de sa dégradation, connaître les acteurs de prévention dans et hors de l’entreprise et le rôle qu’ils peuvent jouer…

Ce livre est une arme pour sortir de la solitude et renouer avec les promesses du travail.»

lundi 21 mars 2011

Dénaturaliser les compétences

Si l’on considère que l’exercice du travail « consiste à vaincre des difficultés dont chacune peut paraître insignifiante » (1) on comprend qu’ainsi sollicité dans ses compétences le salarié perd de vue ce qu’il met en œuvre pour faire son travail au point d’en considérer la réalisation comme « naturelle » et de dire « n’importe qui pourrait faire mon travail à ma place ».

Il appartient au psychologue du travail de dénaturaliser les compétences et d’affirmer l’unicité de l’habileté professionnelle qui se forge dans l’expérience à partir de l’effort personnel, parfois collectif, réalisé pour surmonter les obstacles que le monde oppose à la maîtrise et à la connaissance. (2)

Si une compétence peut être décortiquée en savoirs (connaissance), savoir être (lié à la personnalité) et savoir faire (exécution), elle est beaucoup plus que leur somme, elle dépend d’un savoir agir. Savoir agir en situation de travail, cela veut dire savoir quoi faire, quand, pourquoi, et de façon autonome.

Etre compétent suppose de savoir mobiliser et combiner ses ressources : connaissances, capacités, aptitudes, raisonnements, attitudes. Par exemple : faire du vélo peut se décomposer en savoir pédaler, savoir freiner, savoir accélérer, ce n’est pas l’addition de ces savoirs qui permettra de rouler mais leur combinaison. Et en plus chacun ne procédera pas de la même façon, mais selon son style particulier.

La compétence ne peut pas se comprendre en découpant les savoirs. Elle est liée à la situation de travail. Il y a donc une différence entre les compétences décrites dans une fiche de poste et celles mises en œuvre pendant le travail. C’est pour cela qu’il est difficile de cerner une compétence, car elle existe dans l’action, sinon elle est invisible. Ainsi, dans un CV décrire le contenu du poste est plus explicite que juste citer ce que l’on pense être une compétence.

Il y a au cours de l’expérience de travail une accumulation de compétences. Elles sont plus ou moins en nous selon l’usage que l’on en a eu ou que l’on en a encore. Il y aura acquisition de nouvelles connaissances dans la confrontation à une nouvelle activité qui développera les compétences.

Ce développement exige la volonté ou le désir de mettre en œuvre son intelligence dans le travail pour trouver des solutions aux problèmes posés par le réel du travail et viser un double objectif : une production de qualité et l’accomplissement de soi.

Valérie Tarrou

1) Suzanne Pacaud : « Le travail normal consiste à vaincre des difficultés dont chacune peut paraître insignifiante mais dont l’accumulation rend la tache difficile voire épuisante sur le plan nerveux. » Avec Lahy, Suzanne Pacaud est l’une des premières à avoir pratiqué une analyse psychologique du travail pour comprendre le travail.
Pacaud, S. (1954). « Analyse psychologique et psychophysiologie du travail ». In H.Piéron (Ed), L’Utilisation des aptitudes, Traité de psychologie appliquée. Paris : Puf.
2) Clot, Y. (1999). « La fonction psychologique du travail ». Paris : Puf.
3) Oddone, I. (1977 - 1981 trad française). « Redécouvrir l’expérience ouvrière ». Paris : Editions sociales.

mardi 1 mars 2011

A propos du travail : interview de Dominique Méda

Sociologue et philosophe, Dominique Méda est coauteur, avec Lucie Davoine, de l’étude « Place et sens du travail en Europe : une singularité française ? » qui met en lumière le rapport particulier que les Français entretiennent avec le travail :   http://www.cee-recherche.fr/fr/doctrav/travail_europe_96_vf.pdf
Yves Clot, dans son ouvrage « Le Travail à cœur », développe le paradoxe souligné par ces recherches : « Les Français sont, à la fois, ceux qui accordent le plus d’importance au travail et ceux qui souhaitent le plus voir la place du travail réduite dans leur vie. » (p. 11).
Pour entrer dans le vif du sujet et écouter Dominique Méda : http://www.bastamag.net/article1449.html

1) Clot, Y. (2010). « Le Travail à cœur ». Paris : La Découverte.

mardi 22 février 2011

« Sortir de la souffrance au travail » par C. Dejours

Christophe Dejours, psychanalyste et psychiatre, dans un article du Monde du 22 février analyse les obstacles générateurs de souffrance au travail et développe les solutions visant à reconstruire le lien entre le travail et la vie.
Il pointe particulièrement les effets dévastateurs de l’évaluation (1) : « Parmi les outils de gestion, on a montré que le plus délétère de tous pour la santé mentale est l'évaluation individualisée des performances. Couplée à la menace sur l'emploi, cette méthode d'évaluation se mute en management par la menace. Elle introduit la peur comme méthode de gouvernement, et elle monte tous les travailleurs les uns contre les autres, déstructurant ainsi les solidarités et le vivre-ensemble
Pour lire l’article : http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/02/21/sortir-de-la-souffrance-au-travail_1483153_3232.html

1) Dejours, C. (2003). « L'Evaluation du travail à l'épreuve du réel ». Paris: INRA.

jeudi 17 février 2011

Quand le management utilise les outils de morbidité

Envisager que la connaissance des étapes du deuil donnera aux cadres dirigeants des moyens pour mener à bien auprès des autres salariés la réorganisation engagée par une entreprise (fusion, mutation, licenciement…) est un parti pris retenu par France Télécom puis maintenant par France Télévisions.

Ne peut-on penser que ce choix constitue une ‘double peine’ ? ‘Double’, car elle affectera autant les cadres qui devront appliquer une méthode inadéquate que les salariés qui la subiront. ‘Peine’, car le recours à une conceptualisation des étapes du deuil sonne d’emblée faux, comment l’utilisation des représentations intimes de la mort pourrait apporter des réponses à des souffrances issues du champ du travail ?

Dans l’article écrit par Nolwenn Le Blevennec pour Rue89 « La “Courbe du deuil” de France Télécom à France Télévisions » il m’est de suite apparu que cet usage était « déplacé » : http://eco.rue89.com/2011/02/16/la-courbe-du-deuil-de-france-telecom-a-france-televisions-190719

En clinique, le deuil est une séparation ou une perte caractérisée par son irréversibilité. Si un licenciement, une mutation, peuvent représenter une perte douloureuse de l’emploi ou du poste, la continuité de l’existence de l’entreprise empêche de ressentir cet événement comme irréversible. De plus, la femme ou l’homme concerné ne perd pas son métier, son expérience professionnelle lui appartient en propre, même si elle s’inscrit dans une histoire plus large que le seul sujet.

Dans le cadre d’une réorganisation, le travailleur vit des séparations qui ne relèvent pas du deuil car elles sont potentiellement réversibles. Cette approche n’exclut en rien la souffrance liée à la rupture avec l’activité, une entreprise, des collègues, un environnement que la confrontation quotidienne à la réalité du travail ont rendu familier.

La perte d’une personne aimée inaugure le deuil qui contient des mécanismes complexes à appréhender. Le travail de deuil suppose que le psychisme se transforme. Ce qui avait été affectivement investi doit être repris, selon des étapes nécessaires, en effet, et dans le respect de la temporalité des étapes du deuil de chacun.

Mais le deuil n’est pas l’oubli, c’est une relation qui se modifie mais qui continuera à nous influencer. Aussi tentante que soit la démarche intellectuelle d’établir un parallèle entre ‘perdre son emploi’ et ‘perdre un être aimé’, le recours au travail du deuil dans la sphère professionnelle me parait erroné et grave. Il pousse à un amalgame source d’angoisse, voire de maladie. Mené vers la résignation de la dépossession de sa place dans l’entreprise, le salarié doit assumer seul les suites de décisions qu’il ne peut discuter. Comment parviendra-t-il à se tourner vers un avenir professionnel vidé d’un vécu constituant de son identité personnelle ?

Une réorganisation est une rupture mais pas une mort et ne devrait pas être gérée en référence au travail de deuil. Lors de ce type d’événement, l’entreprise qui s’attacherait à dire ses résolutions, à éclairer les décisions dans lesquelles chacun va devoir s’engager, à en permettre la discussion collective, assumerait son rôle de direction. Elle ne modifierait pas les conséquences de ses choix ou obligations organisationnelles mais dans le respect de ses salariés remplierait son obligation de sécurité de résultat en matière de santé au travail.

Valérie Tarrou

• Ancelin Schutzenberger, A., Bissone-Jeufroy, E. (2008). « Sortir du deuil, surmonter son chagrin et réapprendre à vivre ». Paris : Payot.
• Dolto, F. (1985- Ed 1998). « Parler de la mort ». Paris : Mercure de France.
• Enriquez, E. (1992). « L’Organisation en analyse ». Paris : PUF.
• Freud, S. (1915 – Ed 2011). « Deuil et mélancolie ». Paris : Payot.

mercredi 16 février 2011

Faire taire Jean-Robert Viallet ?

« La Mise à mort du travail », le film de Jean-Robert Viallet, déplie en trois temps - la Dépossession, l'Aliénation et la Destruction- le vécu professionnel d’hommes et de femmes « dans un monde où l'économie n'est plus au service de l'homme mais l'homme au service de l'économie ». L’auteur dénonce les méthodes de gestion de plusieurs entreprises dont celles de la société Carglass qui avait accepté d’être observée et filmée.

Aujourd’hui, cette dernière réclame 200 000 euros à Jean-Robert Viallet pour diffamation. Télérama développe ce sujet : « Carglass s’attaque à “La Mise à mort du travail” » :
http://television.telerama.fr/television/quand-la-societe-carglass-tente-de-faire-lourdement-condamner-un-documentaire-de-france,65630.php

vendredi 11 février 2011

Quand la souffrance éthique atteint la Justice

Dans le contexte de grève des magistrats, avocats et huissiers de justice qui, mis en accusation, dénoncent un manque de moyens, de budgets et d’effectifs ne leur permettant pas de faire correctement leur travail, le Monde rappelle le suicide de Philippe Tran-Van, juge d’instruction, qui le 16 septembre 2010 s’est donné la mort.

La lettre écrite par ce magistrat pour expliquer son geste décrit un profond contexte de souffrance au travail : surcharge de travail, grande implication personnelle pour y faire face au détriment de sa vie familiale, absence de la moindre reconnaissance, dénigrement de ses capacités et qualités personnelles, procédures disciplinaires.

Dans l’exercice empêché de sa charge, les propos de sa femme dénoncent une souffrance éthique : « Pour lui, avoir à établir des priorités, devoir choisir, abandonner des gens à leur détresse, c’était insupportable. »

Parmi les règles de métier, telles que les a théorisées la Psychodynamique du travail, les règles éthiques impliquent un accord entre pairs sur ce qui dans le travail est considéré comme valide, correct, juste ou légitime. Quand les règles éthiques sont atteintes, « le sujet en arrive à exécuter des ordres que pourtant il réprouve parce qu’ils provoquent le désarroi, la souffrance, l’angoisse ou le désespoir des victimes. D’apporter ainsi son zèle à un système qui génère la souffrance et l’injustice provoque un conflit entre ce que le sujet sait ne pas devoir accepter et ce qu’il fait quand même. » (1)

Exercer sa profession dans le domaine de la Justice, avoir choisi de représenter la Loi, et ne pouvoir dans le quotidien de son travail se sentir dans le respect de règles fondamentales tant pour soi que pour ses collègues porte une atteinte majeure à l’équilibre du corps et à l’organisation du psychisme.

La lettre du juge d’instruction témoigne d’un écart qu’il ne pouvait plus combler entre un idéal de soi, ses valeurs, ce qui concrètement en situation de travail était juste ou injuste de faire, moralement acceptable ou pas et les compromis qui régissaient son activité. La visée éthique du travail au regard du sens que l’on souhaite donner à sa vie est centrale.

Valérie Tarrou

1) Molinier, P., (2006). « Les enjeux psychiques du travail ». Paris : Payot.P. 127.

mardi 8 février 2011

Interviewée pour France 5 Emploi

« Faire face à la souffrance au travail », une interview réalisée pour France 5 Emploi écrit par Odile Gnanaprégassame : « Le mal être au travail n’est pas une fatalité. Sortir de l’isolement et mettre des mots sur sa souffrance : tels sont les conseils de Valérie Tarrou, psychologue du travail et psychanalyste. » Pour lire l’intégralité de l’article suivre : http://emploi.france5.fr/emploi/droit-travail/sante/67236547-fr.php

mercredi 2 février 2011

Prix du Meilleur Ouvrage sur le monde du travail

Club d’élus de représentants des salariés, le Toit Citoyen, qui se veut lieu de partage d’expérience, vient de décerner les Prix du Meilleur Ouvrage sur le monde du travail.

Cette première édition a élu Yves Clot lauréat dans la catégorie Expert pour son ouvrage « Le Travail à cœur : pour en finir avec les risques psychosociaux » paru aux Editions La Découverte. Vincent Talaouit et Bernard Nicolas, auteurs de « Ils ont failli me tuer » paru chez Flammarion, sont lauréats dans la catégorie Salarié.

« Le Prix du Meilleur Ouvrage sur le monde du travail est le premier prix littéraire à aborder le monde du travail sous un angle prospectif en remettant un prix à un professionnel pour son regard spécifique sur les mutations à l’œuvre et un prix à un salarié pour la véracité et l’impact de son témoignage. »
http://www.toitcitoyen.com/Et-les-laureats-sont_a359.html

mardi 1 février 2011

Souffrance au travail : l'analyse de l'anthropologie juridique

A propos de la perte de sens du travail induite par le taylorisme actuel tant pour les cols bleus que pour les cols blancs : un article éclairant paru dans Le Monde du 31-01-2011 « Les cadres sont-ils les nouveaux OS du XXe siècle ? » par Gabriel Blumen, chercheur en anthropologie juridique. http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/01/31/les-cadres-sont-ils-les-nouveaux-os-du-xxe-siecle_1471793_3232.html

samedi 29 janvier 2011

La Poste–France Télécom : répétition d’un scénario noir?

L’Humanité du 27 janvier publie « Brisons l’omerta ! ». Un article qui pointe les méthodes de management de la Poste, la dégradation des conditions de travail qu’elles impliquent et leurs effets maltraitants pour la santé : « l’idée que le suicide puisse devenir un acte ultime de résistance nous est insupportable » :
http://www.humanite.fr/26_01_2011-brisons-l%E2%80%99omerta-463388

Depuis le 1er janvier 2011 le secteur postal est ouvert à la concurrence et la Poste a perdu son monopole. Malgré une mobilisation populaire forte, par une loi votée le 12 janvier 2010, la Poste est devenue société anonyme. Le gouvernement a expliqué que ce changement de statut permettrait de réaliser des augmentations de capital et de trouver de nouveaux financements. Pour le moment les actionnaires restent l’Etat et la Caisse des Dépôts. Société anonyme la Poste demeure donc une entreprise publique au sein de laquelle travailleront à la fois des fonctionnaires et des salariés relevant de contrats de droit privé.

Ainsi après France Télécom, la Poste connait une restructuration issue du même scénario. Pour être concurrentielle, combien de licenciements seront jugés nécessaires par la direction de la Poste ? Les syndicats avancent le chiffre de 50 000 emplois supprimés d’ici 2015. Ce plan social dira-t-il son nom ? Ou pression, accusations infondées, augmentation du temps de travail, changement incessant de bureau, transfert d’un centre postal à un autre… pousseront des femmes et des hommes au mieux à la démission au pire au suicide ? Plusieurs postiers se sont déjà donné la mort en 2010.
Lire sur ce sujet les témoignages présentés par un autre article de L’Humanité du 27 janvier « Catastrophes humaines en cours à la Poste » : http://humanite.fr/26_01_2011-catastrophe-humaine-en-cours-%C3%A0-la-poste-463387

La psychiatre Brigitte Font le Bret reçoit des employés de la Poste et dit entendre dans ses consultations Souffrance et Travail des mots qui sont « des copier-coller » de ceux des salariés de France Télécom. Elle témoigne de suicides, de tentatives de suicides, de travailleurs qui souffrent ne plus être libres d’exercer leur métier selon leur conscience professionnelle et leurs valeurs collectives. Pour l’entendre, écouter le 3e sujet du journal de France Télévision : http://info.francetelevisions.fr/?id-video=cafe_HD_1200_grenoble_midipile_140111_276_14012011123440_F3

Comme le précise ce médecin, face à la souffrance vécue au travail il ne s’agit plus « d’observer ». Comment entrer en résistance quand la liberté est considérée comme acquise, et que l’ennemi n’est pas pensé comme un ennemi ? A quoi résister ? Où sont les lignes ? Quand le management par la peur existe… en réponse, collectivement et individuellement, trouver le courage de lui opposer le respect de soi, de sa liberté, de ses valeurs, de ses compétences, de la responsabilité et du droit… pour ne pas travailler dans la soumission.

Valérie Tarrou

vendredi 28 janvier 2011

Les suites du licenciement de Marie Pezé de la consultation Souffrance et Travail de Nanterre

Publié dans le Monde du 25 janvier 2011 un article de Bertrand Bissuel intégralement repris ci-dessous : « Une spécialiste de la souffrance au travail poursuit son employeur -La psychologue Marie Pezé attaque l'hôpital de Nanterre. Elle conteste son licenciement. »

«Licenciée en juillet 2010, Marie Pezé, l'une des plus grands spécialistes de la maltraitance dans le monde de l'entreprise, va saisir la justice pour obtenir réparation des préjudices causés, selon elle, par son ex-employeur, le Centre d'accueil et de soins hospitaliers (CASH) de Nanterre. C'est le tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui examinera sa requête.

Mme Pezé avait été recrutée en 1975 par le CASH pour y exercer des fonctions de psychologue dans le service de chirurgie. Vingt-deux ans plus tard, elle a ouvert, au sein de l'établissement, une consultation "Souffrance et travail", où des centaines de salariés en situation de détresse professionnelle ont été accueillis.

Par la suite, d'autres lieux du même type ont été créés à travers la France, donnant lieu à la constitution d'un réseau nationalement reconnu.

Atteinte par une pathologie évolutive, Mme Pezé est reconnue travailleuse handicapée à 80 % depuis la fin des années 1990. La direction du CASH a procédé à quelques aménagements pour tenter de faciliter la tâche de la psychologue. Mais son état de santé s'est dégradé - tout comme les relations qu'elle entretenait avec la hiérarchie de l'établissement. Finalement, la médecine du travail l'a déclarée définitivement "inapte" à son poste. Son reclassement dans l'hôpital a été envisagé mais l'hypothèse a tourné court. Mme Pezé a donc été congédiée.

En novembre 2010, elle a adressé au CASH une "demande indemnitaire", car elle estime avoir été lésée pour plusieurs raisons. Selon elle, la direction n'a pas pris les mesures adaptées à son handicap, ce qui a engendré du stress et du surmenage. Mme Pezé affirme également avoir été en butte à la mauvaise volonté d'une partie des cadres de l'établissement.

Enfin, elle reproche au CASH des irrégularités sur le plan administratif : elle dit avoir été rémunérée sur la base d'un mi-temps alors que sa charge de travail était nettement plus importante ; de plus, elle est restée soumise au statut de vacataire pendant plus de vingt ans. C'est pourquoi elle réclame à l'hôpital 331 000 euros de dédommagement.

Le directeur, Philippe Thomas, lui a répondu non dans une lettre datée du 12 janvier. Il fait notamment valoir que la prescription joue pour les demandes de rappels de salaires concernant la période antérieure à l'année 2006. Il s'étonne par ailleurs de "la tardivité" des doléances de Mme Pezé et souligne qu'"elle n'a jamais contesté la répartition de son temps de travail". Il juge "exorbitantes" et "infondées" les demandes d'indemnisation au titre des "préjudices moral et de santé" : "L'établissement a - ... - été attentif, dans la mesure du possible, à la mise en œuvre d'actions permettant d'améliorer les conditions de travail de l'intéressée", se défend-il.

Mme Pezé a décidé de contester cette décision devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Compte tenu des délais actuellement observés dans cette juridiction pour traiter les recours, l'affaire pourrait être jugée en 2012.»

1) Coordonnées du réseau : http://www.karlotta.com/set.swf

samedi 22 janvier 2011

Les missions de la médecine du travail

Dans le contexte d’une proposition de loi déposée par le Sénat réformant la médecine du travail, le groupe « Travail et Emploi » d’Un Monde d’Avance (1) a rencontré Philippes Davezies, enseignant chercheur en médecine et santé au travail à l'Université Claude-Bernard Lyon 1, qui développe dans cet interview l’historique et les missions de la médecine du travail : http://www.mediapart.fr/club/edition/un-monde-davance/article/210111/entretien-avec-philippe-davezies-enseignant-chercheur-e

Un Service de Santé au Travail a pour vocation d’être une ressource efficace pour l’amélioration des conditions de travail et de la qualité de vie dans l’entreprise. Son action médicale concerne la prévention et la veille de la santé des salariés. Dans le cadre de ses consultations le médecin du travail mène des entretiens individuels où le salarié peut s’exprimer librement et assure des visites : d’embauche, périodiques, de préreprise et de reprise après un arrêt de travail.

La visite de préreprise est importante à connaître. Elle relève de l’initiative du salarié, ou du médecin traitant ou du médecin conseil de la sécurité sociale. L’employeur n’en est pas informé et elle peut être utile au médecin du travail lorsqu'une modification de l'aptitude au poste de travail est envisageable. Il peut ainsi étudier les possibilités et les conditions de reprise (aménagements, temps partiel thérapeutique…) alors que le salarié est toujours en arrêt de travail. Cet entretien avec le médecin du travail permet au salarié d’aborder les difficultés qu’il peut éprouver face au retour dans l’entreprise et d’être conseiller dans des démarches de réadaptation.

Le médecin du travail réalise également des actions de veille, d’alerte, d’information et de conseils en milieu de travail. Notamment en ce qui concerne : l'hygiène et la sécurité ; l'évaluation des risques professionnels, notamment à travers la rédaction de la fiche d'entreprise ; l'amélioration des conditions de vie et de travail dans l'entreprise, l'adaptation des postes, des techniques, et des rythmes de travail à la physiologie humaine ; la prévention des accidents de travail et des maladies professionnelles ; la protection des salariés.

Médecin, ce praticien se doit d’exercer en s’appuyant sur les principes d’un travail adapté à l’homme, et non d’un homme adapté au travail, et d’un salarié acteur de sa propre santé.

Valérie Tarrou

1 - Un Monde d’Avance organise samedi 5 février à la mairie du XIVe à Paris un colloque « A la reconquête du travail » : http://www.unmondedavance.eu/A-la-reconquete-du-travail

mardi 11 janvier 2011

« Journée mondiale du travail décent »

La Journée mondiale du travail décent est organisée le 7 octobre de chaque année depuis 2008 par la Confédération syndicale internationale.
Lors de cette Journée de mobilisation, les syndicats à travers le monde défendent le travail décent pour l'inscrire au coeur des actions gouvernementales afin de construire une nouvelle économie qui se donne pour objectifs : croissance et respect des personnes.
Site de la Journée 2009 : http://2009.wddw.org/-Francais-
L’Entreprise.com propose un dossier spécial « Journée mondiale du travail décent » et engage à la lecture d’une sélection d’articles publiés à l'occasion de ces Journées :
http://www.lentreprise.com/gerer-une-equipe/dossier-special-journee-mondiale-du-travail-decent_21553.html